La liberté de la presse se définit comme le droit reconnu à tout journaliste d’utiliser, en toute liberté, le média de son choix pour exprimer son opinion ou pour informer les citoyens des faits liés à la vie en société dans le respect des lois en vigueur. Mécanisme de régulation de la société démocratique, la liberté de la presse suppose donc la liberté d’entreprendre ; la liberté de dire, d’écrire, de montrer ; la liberté de recevoir ; le droit de ne pas être inquiété ni être menacé dans son intégrité physique ou morale dans l’exercice de ses fonctions.
La liberté de la presse n’est effective que dans le cadre d’un État de droit, d’un régime démocratique, entendu comme le système politique dans lequel la dévolution du pouvoir procède d’une souveraineté populaire exprimée à travers le suffrage universel. La liberté de la presse est ainsi consubstantielle à la démocratie en ce sens qu’elle ne peut se réaliser dans un régime autre que démocratique. Elle se nourrit donc de la démocratie et la nourrit en retour.
Depuis 2016, le Centre National de Presse Norbert Zongo publie un rapport sur l’état de la liberté de la presse au Burkina Faso. Fruit d’une évaluation par les pairs, le rapport présente, chaque année, un état des lieux de l’exercice de la liberté de la presse. Dans le présent article, nous nous évertuons à exposer, d’une part, la situation de la liberté de la presse en 2020 et, d’autre part, à faire le bilan des rapports des cinq dernières années (2020, 2019, 2018, 2017 et 2016). Aussi bien pour l’année 2020 que pour les cinq dernières années, nous insisterons sur les faiblesses et les contraintes des médias et des journalistes burkinabè révélées par les différents rapports. Un autre article sera consacré, à la suite de celui-ci, aux acquis et atouts mis en exergue par les mêmes rapports.
1. La démarche méthodologique
La méthodologie qui conduit à la moyenne annuelle de l’Indice de la liberté de la presse (ILP) s’inspire de la démarche de l’Indice de durabilité des médias ou Media Sustainability Index (MSI) de l’International Research and Exchanges Board (IREX) . Le travail de base est effectué par un panel des experts nationaux. Chaque année, le panel réunit, à Ouagadougou, une vingtaine de participants issus des médias, de la communication, de la publicité et d’organisations de défense de la liberté d’expression et de la presse. Dans une démarche qualitative et participative, le panel examine minutieusement l’état d’exercice de la liberté de la presse sur la base de cinq critères appelés objectifs qui sont :
Objectif 1 : Les normes juridiques et sociales protègent et favorisent la liberté d’expression et de la presse ainsi que l’accès aux informations publiques au Burkina ;
Objectif 2 : Le journalisme satisfait aux normes de qualité professionnelle ;
Objectif 3 : Il existe une diversité de médias qui offrent aux citoyens des informations objectives et fiables ;
Objectif 4 : Les entreprises de presse sont bien gérées et viables permettant le renforcement de la liberté de la presse ;
Objectif 5 : Les institutions et organisations professionnelles des médias agissent pour les intérêts professionnels des médias.
Chaque objectif comporte des indicateurs. La moyenne de l’objectif est déterminée à partir de points ou de scores allant de zéro (0) à quatre (4) traduisant la réalité vécue par les médias durant l’année étudiée. Et c’est la somme des notes des indicateurs qui donne la note de l’objectif ; de la même manière c’est la somme des notes des objectifs qui donne la moyenne finale de l’Indice de la liberté de la presse. En d’autres termes, pour qu’un objectif soit considéré comme atteint, il faut que l’ensemble de ses indicateurs soit pris en compte. Les indicateurs interviennent comme les conditions à remplir pour justifier l’atteinte ou pas d’un objectif et les objectifs pour justifier la note finale annuelle de l’état de la liberté de la presse. Cette note finale représente l’Indice de la liberté de la presse de l’année étudiée.
Il est important de souligner que chaque expert reçoit une dizaine de jours avant le panel la grille de notation, y travaille d’abord en solitaire, puis expose, le jour du panel, ses notes et ses commentaires. Les notes sont confrontées les unes aux autres pendant les discussions et réajustées si nécessaire c’est-à-dire au cas où des écarts sont assez significatifs. Elles peuvent être données en nombres entiers (0 ; 1 ; 2 ; 3 ou 4) ou en nombres décimaux (0,5 ; 1,5 ; 2,5 ou 3,5). Une échelle de notation est établie pour déterminer la situation réelle des médias de l’année étudiée. Elle est subdivisée en quatre situations-types résumées dans le tableau ci-après :
Échelle de notation Situation correspondante
Entre 3 et 4 Situation très bonne
Entre 2 et 3 Situation plutôt bonne
Entre 1 et 2 Situation à problèmes spécifiques
Entre 0 et 1 Situation difficile